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HISTOIRE DE L'ALGERIE

HISTOIRE DE L'ALGERIE

Sont présentées ici des recherches historiques sur l'Algérie du XIXème siècle et de manière générale sur le Maghreb et la France. Aux recherches s'ajoutent des points de vue, des notes de lecture et des instruments de travail.


Ouzellaguen 25-28 juin 1851 - Autopsie d'un grand combat - Guerre totale, guerre cruelle - Le coup d'épée du maréchal Bugeaud

Publié par Abdel-Aziz Sadki sur 19 Février 2013, 17:41pm

Catégories : #Histoire des Ouzellaguen

 

3) Le coup d'épée du maréchal Bugeaud

 

Pour la première fois, le danger arrive directement aux portes des Ouzellaguen. L'expédition du maréchal Bugeaud, duc d'Isly, qui opère avec ses 12 000 hommes simultanément avec la colonne du général Bedeau partie de Sétif, s'engage dans la vallée de l'Oued Sahel en s'efforçant d'en soumettre les populations pour réaliser son objectif final, débloquer Bougie. Au total, il n'est pas moins de 15 000 hommes en ligne, du jamais vu pour les Kabyles, que l'on voulait ainsi terrifier profondément au point de les forcer à livrer leur pays. Les Ouzellaguen se mobilisent en masse, comme tous les Kabyles de la région, en se réunissant aux contingents de la rive gauche de l'Oied Sahel et de l'intérieur du Djurdjura, et se portent en avant d'Akbou, point retenu pour la concentration et le combat. Les opérations sont concertées entre les contingents de la rive gauche et ceux de la rive droite. Les Kabyles ouvrent le feu sur la colonne et les combats commencent au lieu dit. L'axe du combat finit par dévier sur les At Abbès, qui supportent alors l'essentiel du choc, notamment à Azrou, même si des contingents des Illoula, des Ouzellaguen, des At Oughlis, des At Aïdel et des Ighawawen, sont venus à leur secours. De nombreux villages des At Abbès, spécialement une de leur fraction, sont détruits complètement. Bugeaud donne l'exemple d'une politique de terreur contre les Kabyles que ses successeurs appliqueront avec zèle :

"Il était nécessaire de faire un exemple qui frappât de terreur toutes les montagnes jusqu'à Bougie. J'ordonnai la destruction et le pillage de ces localités. Presque toutes sont flanquées par de belles tours en maçonnerie." Il espère voir ainsi livrer le reste du pays sans coup férir : "La riche tribu des Beni-Abbès, qui domine toute la contrée par sa force et son industrie, a éprouvé dans cette circonstance une perte immense."[1]

 

p 128

 

Les soumissions sont négociées longuement. Après les At Abbés et les At Mellikeuch, les Ouzellaguen en viennent à se soumettre par l'entremise de Ben Ali Chérif, le mardi 18 mai 1847[2], jour où ils reçoivent leur organisation : "Le corps expéditionnaire bivouaque à 9 hhres 1/2 sur la rive gauche de la rivière au dessous du pic d'Akbou dans un lieu appelé Tattatert. [...] Le marabout Si Ali Cherif de la tribu des Illoula vient traiter de la soumission de cette tribu et de celle des Ouerzellaguen et des Beni Aidel."[3] Ils seront administrés par deux cheikhs pris parmi les Ouzellaguen, Saïd ou Moahmed[4] et Ahmed ben Arrauche, investis officiellement, avec des burnous de fonction, et intégrés politiquement à la zawiyya de Chellata, au "commandement" de Ben Ali Chérif.[5] Dans les mois qui ont précédé l'expédition, des tractations nombreuses, en vue de l'organisation du territoire qu'elle aura conquis, se sont fait jour : pour ce qui est des Ouzellaguen, des prétendants faisaient savoir, faussement en fait, qu'ils avaient sur eux une autorité traditionnelle, notamment la famille Ou Rabah, Ben Ali

© Abdel-Aziz Sadki

mis en ligne le 19 février 2013


[1] 2 EE 7, Bugeaud au ministre de la guerre, 17 mai 1847, bivouac sur l'Oued Sahel, rive droite, chez les At Abbès.

[2] 10 H 78, "Etat des tribus organisées par M. le Maréchal gouverneur général pendant sa marche sur l'Oued Sahel", par Daumas, le 24 mai 1847, au camp de Tizi, sous Bougie, pour le compte du gouverneur général.

[3] H 213, Journal de marche de la colonne Bugeaud, dans l'Oued Sahel, mai 1847.

[4] Dans un autre texte, il est orthographié Saïd ou Mohand.

[5] Les conditions de soumission proposées par Bugeaud sont vivement discutées : les Kabyles, par exemple, ne veulent pas payer l'impôt. Et Bugeaud a eu grand mal à leur faire adopter le principe d'un léger impôt, qui consacre la souveraineté française et la sujétion des Kabyles. Il est évident que les Ouzellaguen ne voulaient pas d'une soumission, avec intégration dans un commandement pesant, motivés par l'espérance de reprendre peu après leur indépendance. Et les engagements de garantie pris immanquablement par Ben Ali Chérif pour amener les Ouzellaguen à soumission, comme pour les autres populations, ont été un obstacle sérieux pour lui de briguer le commandement qu'il espérait depuis longtemps. Il craignait de tout perdre dans une réaction de rejet et d'hostilité déclarée de ses congénères, De plus, il avait en vue un de ces grands commandements, embrassant une partie importante du pays kabyle, qu'il voulait tout à fait autonome et entretenant des relations d'amitié, certes, mais surtout d'égalité avec les Français. Il ne tient pas être confiné dans le rôle d'un simple agent, valet de l'autorité française. Le marabout Ben Ali Chérif est nécessairement déçu de la tournure prise par les événements.

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