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HISTOIRE DE L'ALGERIE

HISTOIRE DE L'ALGERIE

Sont présentées ici des recherches historiques sur l'Algérie du XIXème siècle et de manière générale sur le Maghreb et la France. Aux recherches s'ajoutent des points de vue, des notes de lecture et des instruments de travail.


Ouzellaguen 25-28 juin 1851 - Autopsie d'un grand combat - Guerre totale, guerre cruelle - Que la soumission soit une parenthèse

Publié par Abdel-Aziz Sadki sur 19 Février 2013, 17:48pm

Catégories : #Histoire des Ouzellaguen

 

4) Que la soumission soit une parenthèse

 

La soumission des Ouzellaguen ne dure pas. À son retour de Bougie, la colonne, dirigée cette fois par le général Gentil désigné pour la ramener à Alger, les Ouzellaguen manifestent de nouveau leur hostilité, se repentant de s'être soumis. La colonne installe son campement à Azib ou Safsaf et y demeure les journées du 27 et du 28 mai 1847. Immédiatement, des coups de feu s'engagent entre des Kabyles et les grands gardes du camp. Un peu plus tard, les rassemblements se poursuivant du côté des Ighawawen, sans aucun doute des Ouzellaguen avec des contingents alliés, une fusillade éclate. La colonne a des instructions pour ne pas s'exposer à des combats avec des Ighawawen, dont l'issue n'est pas assurée, et elle finit par reprendre sa route, séjournant le 29 à Akbou...

Azib ou Safsaf est le débouché de la route qui fait communiquer le bassin supérieur du haut Sébaou avec la Soummam par Tizi N'Chéréâ. La route emprunte le territoire des Ouzellaguen, avant d'arriver au bout de 3 heures à Azib ou Safsaf. Les Ouzellaguen se préparaient donc au combat, puisque la colonne Gentil peut se hasarder à remonter cette route et engager le combat. Scénario qui s'est produit en 1851 avec la colonne Camou.

 

p 130

 

Les Ouzellaguen reprennent la lutte, et ils font le serment, en août 1847, avec Amzian ou Rabah[1] et leurs alliés, de s'opposer dorénavant à toute colonne qui se présente. Ils opèrent là un glacis qui verrouille du côté de Bougie, à hauteur de la Moyenne Soummam :

"Les antécédents d'Amzian vis-à-vis de nous rapprochent naturellement de lui les fanatiques, les mauvais sujets, en un mot tous les gens interessés au trouble, à quelque tribu qu'ils appartiennent ; aussi y a-t-il eu, ces jours derniers, une assemblée nombreuse d'individus appartenant aux Beni Immel, B. Oughlis, Mecissen et Ourzellaguen, lesquels ont échangé le Mizrag, comme gage qu'ils se leveront ensemble pour la Guerre quand le moment sera venu."[2]

Les Ouzellaguen interceptent les communications ennemies passant par la vallée de la Soummam, coupent les routes des marchands, notamment des At Abbès, qui vont commercer avec Bougie et soutiennent les At Oughlis Assameur, indépendants, dans leurs entreprises contre les At Oughlis Imzalen, soumis et dépendants d'Ahmed ou Mehenna. Du côté de Ben Ali Chérif, ils prennent aussi des dispositions, ainsi en août de la même année :

"Les Zouaouas, Illoula, b. Ourlis, Ouzaldja [Ouzellaguen], ont sommé Ben Ali Chérif de marcher à leur tête pour combattre lorsque nous reparaitrions dans leur pays ; ils se repentent de s'être soumis si facilement, mais les Beni-Abbès, qui ont reçu un dur châtiment, sont venus le rassurer en lui promettant leur appui contre ses nouveaux ennemis. »[3] Ben Ali Chérif, après avoir été sermonné pour son "amitié pour les Chrétiens" est contraint de verser une contribution de 150 douros, comme soutien à la guerre. Ben Ali Chérif est profondément irrité de sa situation et il s'en plaint constamment à Sétif, allant jusqu'à menacer de rendre son "commandement" – il craint beaucoup pour lui –, surtout après

 

p 131

 

l'exécution au mois de septembre 1847 par les At Yala de son parent le caïd Ben Smati, assassinat qui n'a pas été vengé par les Français.

En conséquence, les Ouzellaguen prennent part au combat, dirigé par Amzian, contre les troupes de Bougie, sur l'Oued Ghir, au mois de septembre 1847.[4]

La guerre, larvée ou véritable, se poursuit encore plusieurs années, avec des fortunes diverses. Nous n'en dirons pas toutes les péripéties. Une colonne, en 1849, celle de Canrobert, s'attaque aux At Mellikeuch, sans grand succès. D'autres colonnes sont mises en mouvement à l'autre bout de la vallée de la Soummam, notamment en 1850, celle du général Barrai qui trouve la mort aux At Immel, au cours d'un combat, qui, avec les At Oughlis, a vraisemblablement vu la participation des Ouzellaguen. Ces derniers, comme fantassins, se produisent sur les lieux où leurs actions, avec le chérif Moulay Brahim, les portent. Nous livrons dans ce qui suit un exemple de ces opérations, au début du mois d'août 1850 :

"Moula Ibrahim, après s'être tenu tranquille pendant quelque temps, recommence ses courses dans la vallée.

La bande, qui en juin dernier, n'était guère que d'une trentaine de fantassins et de quelques cavaliers, est considérablement augmentée, si j'en crois les rapports qui me parviennent car on lui donne 50 cavaliers et beaucoup de fantassins, tous gens sont avec de Zouaoua, Illoula, Ouzellaguen et Beni Oughrlis du haut.

Avec ce monde et secondé par des gens des trois dernieres tribus mentionnées plus haut qui sont ses affidés mais qui ne résident pas avec lui, il a fait une razzia dimanche dernier, 4 du courant, dans le haut de la rivière, entre Micisna sur la rive droite et Beni Oughrlis du bas sur la rive gauche, il a enlevé des mulets et une dizaine de troupeaux de moutons et de chèvres, appartenant à Mezgoug et El Flaï [Fellaye], villages des Beni Oughrlis du bas et Aït Daoud et Zinouna, villages de Mecisna.

Il n'a pas réussi à enlever ceux de Takaatz, on lui a même pris un homme."[5]

 

p 132

 

Aucune colonne ne s'est véritablement présentée, depuis 1847, au pied des Ouzellaguen, face à leurs villages. Jusque-là, ces derniers ont réussi à se prémunir, aux pris de morts et blessés qu'il n'est pas possible de mesurer, des tentatives de subversion, visant à faire main basse sur eux-mêmes et leur territoire, en prenant part à tous les combats et sur tous les terrains : contre les colonnes, contre l'action de Bougie, de Sétif, d'Aumale, contre coups de main et les déprédations du lieutenant Beauprête, contre les prétentions insupportables de Ben Ali Chérif et d'Ou Rabah, contre les menées hostiles des populations soumises et même, en 1850, contre les At Oughlis Assameur, qui s'étaient finalement soumis, se faisant fort d'amener les Ouzellaguen à en faire autant ; El Hadj Hannich comptait bien ainsi les intégrer à son caïdat, mais il n'y réussit pas.

Les Ouzellaguen ne peuvent ni veulent se résoudre à laisser le fruit de leur long et coûteux travail fondre d'un seul coup. Mais le combat se resserre, comme un nœud coulant, autour d'eux. Mieux que leurs voisins de la vallée de la Soummam, les At Oughlis, les At Aïdel ou les Illoula Assameur, les Ouzellaguen ont su conserver des raisons profondes de livrer combat.

 

© Abdel-Aziz Sadki

mis en ligne le 19 février 2013


[1] Amzian ou Rabah dirige les insurgés, depuis plusieurs années déjà. Lors de la campagne de Bugeaud en mai 1847, il s'est dissimulé, semble-t-il. Il reparaît peu après, pour reprendre la lutte, tenter de défaire les progrès de cette expédition et s'oppose ainsi au reste de sa famille, notamment à ses neveux, qui, dès la fin de 1846, s'est ralliée au parti de la France. Toutefois, cette situation n'est pas aussi claire : il semble bien qu'il y ait une véritable politique familiale puisqu'un des neveux, Ahmed ou Mehenna, qui continue de voir son oncle Amzian, joue peut-être un double jeu.

[2] 43 KK 40, 15 août 1847, le commandant supérieur de Bougie, de Wengi, à la subdivision d'Alger.

[3] 40 KK 165, rapport du mois d'août 1847, subdivision de Sétif.

[4] Combat dans lequel deux cavaliers du maghzen de Bougie sont blessés, après s'être brillamment battu, l'un est le futur caïd des Mcisna dont le fils sera un moment caïd des Ouzellaguen, à partir de 1876, et l'autre, ce n'est autre que celui qui sera le deuxième caïd en date des Ouzellaguen, Mohamed Arezki ou Idir.

[5] 2 H 24, rapport politique du 6 août 1850, le commandant supérieur du cercle de Bougie, de Wengi, au gouverneur général.

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