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HISTOIRE DE L'ALGERIE

HISTOIRE DE L'ALGERIE

Sont présentées ici des recherches historiques sur l'Algérie du XIXème siècle et de manière générale sur le Maghreb et la France. Aux recherches s'ajoutent des points de vue, des notes de lecture et des instruments de travail.


Ouzellaguen 25-28 juin 1851 - Autopsie d'un grand combat - Les officiers et la troupe

Publié par Abdel-Aziz Sadki sur 3 Février 2013, 15:46pm

Catégories : #Histoire des Ouzellaguen

 

c) L'état-major et les officiers

Nous n'avons que peu d'informations sur l'état-major général et le corps d'état-major qui se compose de 7 officiers, ayant à leur disposition 22 chevaux, c'est-à-dire certainement des officiers suivants : le général Camou, le général Bosquet, le colonel Jamin, le colonel de Cambray, le lieutenant-colonel Le Rouxeau[1], les capitaines Besson, de toute évidence officier d'ordonnance du général Camou, et Balland. Les états-majors de Camou et de Bosquet ont fusionné. Le colonel Paul Victor, vicomte Jamin, appartient aux affaires arabes depuis 1843 ; il a participé à de nombreuses missions comme chef d'escadron et lieutenant-colonel. Peu après la campagne de l'Oued Sahel, c'est lui qui est chargé du transfert et de la garde des otages, et qui assure l'intérim à la subdivision de Sétif lors des absences de Bosquet. Il est bientôt, dans les mois qui suivent, promu général de brigade.

 

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La colonne est dirigée en tout par 151 officiers, pourvus de 91 chevaux. Parmi eux sont cités le chef de bataillon de Princey, le capitaine Billot, le capitaine Charrabas, le capitaine Augeraud, le lieutenant Ben Dris qui appartient aux tirailleurs indigènes. Charles Augeraud est né à Excideuil, en Dordogne, le 21 mars 1813. Il entre à l'École Polytechnique en novembre 1833, en sort sous-lieutenant-élève en 1835, à l'École d'application de Metz. Il est lieutenant d'artillerie en second le 25 février 1838, puis lieutenant en premier le 5 décembre 1840. Augeraud est envoyé en 1841 en Algérie. Le 12 mai 1843 il est pris comme officier d'ordonnance du gouverneur général. Le 11 juillet de la même année, il se fait remarquer au cours d'un combat dans l'Ouarsenis, recevant en récompense la croix de chevalier de la Légion d'honneur. Attaché comme adjoint à la direction d'Alger, il est bientôt installé comme chef du bureau arabe de Bougie, le 9 avril 1845. Il est capitaine en premier le 2 mai 1849. Il connaît très bien la région de Bougie, ayant beaucoup contribué à l'établissement et au fonctionnement du bureau arabe. Sa présence dans la colonne est un véritable atout.

 

2) La troupe

 

a) Une colonne classique

Bugeaud fait faire des progrès assez indéniables dans la forme, la structure et la conduite des colonnes. Il en généralise les caractères et systématise certaines des pratiques existantes, jusqu'à les rendre tout-à-fait typiques. Aussi bien pour la préparation, l'acheminement en campagne de vivres, de munitions, l'utilisation des transports, par le procédé de la réquisition qui frappe les populations, l'équipement, l'interrogation des indigènes pour amasser les renseignements souhaités sur les troupes ennemies, les dispositions des populations, les routes, les données topographiques, les ressources en grains, en eau et en bois du pays.

La composition et la taille des colonnes cherchent à se conformer davantage à la nature de leurs missions, aux nécessités du pays, à ses moyens de communications, aux tactiques utilisées par les populations arabes et kabyles, à l'ampleur du danger rencontré. À cette fin, il convient de les rendre ou plus lourdes, ou plus légères, ou plus équilibrées. Plus légères pour jouer de rapidité, surtout devant un adversaire insaisissable, précipiter la chaîne des soumissions, réaliser des actions d'audace, des coups de main, des razzias, des représailles sur des populations...

 

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L'effectif de la colonne

L'effectif des troupes françaises est connu presque parfaitement grâce aux "situations numériques des troupes" régulièrement portées dans le journal de marche de la colonne ou après chaque combat. Le télégramme envoyé le 26 juin 1851 par le commandant de la subdivision d'Aumale, d'Aurelle de Paladines, au général commandant la division d'Alger à Blida, Blangini, nous apprend l'état des troupes, suite aux nouvelles du général Camou apportées par le lieutenant-colonel Bourbaki : "L'effectif est de 5400 h. [hommes] et de 600 chevaux ou mulets."[2]

La situation de la colonne au 20 juin 1851 nous donne le détail :

- État-major général et corps d'État-major : 7 officiers, 22 chevaux d'officiers disponibles.

- Intendance militaire : 2 officiers, 3 chevaux d'officiers.

- 8e léger : 29 officiers, 1249 hommes de troupe, 10 chevaux et 18 mulets disponibles.

- 22e léger : 18 officiers, 554 hommes de troupe, 4 chevaux et 9 mulets disponibles.

- 8e de ligne : 41 officiers, 1419 hommes de troupe disponibles et 144 hommes de troupe indisponibles, 11 chevaux d'officiers et 26 mulets disponibles.

- Zouaves : 14 officiers et 809 hommes de troupe, 5 chevaux d'officiers et 10 mulets disponibles.

- Tirailleurs indigènes : 17 officiers et 624 hommes de troupe disponibles et 2 hommes de troupe indisponibles, 6 chevaux d'officiers et 9 mulets disponibles.

- 1er chasseurs d'Afrique : 2 cavaliers, avec leurs 2 chevaux disponibles.

- 2e escadron du 3e chasseurs d'Afrique : 4 officiers et 130 cavaliers disponibles, 5 chevaux d'officiers et 134 chevaux d'hommes de troupe disponibles.

 

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- Ier spahis : 1 cavalier avec son cheval.

- 3e spahis : 12 cavaliers avec 11 chevaux disponibles.

- Génie : 2 officiers et 28 hommes de troupe, 5 chevaux d'officiers et 6 mulets disponibles.

- 6e batterie du 3e d'artillerie : 2 officiers et 50 hommes de troupe, 3 chevaux d'officiers et 4 chevaux d'hommes de troupe et 27 mulets disponibles et 1 mulet indisponible.

- 6e batterie du 11e d'artillerie : 41 hommes de troupe, 3 chevaux d'hommes de troupe et 23 mulets disponibles.

- 1er escadron du train des équipages : 2 officiers et 105 hommes de troupe, 4 chevaux d'officiers et 21 chevaux d'hommes de troupe et 166 mulets disponibles.

- 3e escadron du train des équipages : 1 officier, 28 hommes de troupe, 1 cheval d'officier et 5 chevaux d'hommes de troupes et 40 mulets disponibles.

- Ouvriers d'administration : 9 hommes de troupe.

- Officiers de santé : 4 avec leurs 4 chevaux d'officiers.

- Services administratifs : 6 officiers et 48 hommes de troupe, 6 chevaux d'officiers.

- Interprètes militaires : 2 officiers avec leurs 2 chevaux.

Au total, la colonne compte 5406 hommes et 607 chevaux et mulets. Elle se répartit en 151 officiers et 5255 hommes de troupe dont 5109 disponibles et 146 indisponibles, 272 chevaux dont 91 chevaux d'officiers et 181 chevaux d'hommes de troupe, 335 mulets dont un indisponible. Il est des troupes qui ne sont pas comptabilisées comme le goum de Bougie[3] , relayé le 26 juin par celui du lieutenant Beauprête. Il faut donc compter que la colonne a un effectif voisin de 5600 hommes. C'est moins que l'effectif, 8000 hommes, dont disposait Saint-Arnaud, un mois et demi auparavant, pour opérer en Petite Kabylie.

 

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De taille moyenne, la colonne est suffisante pour être autonome et opérationnelle. Elle est en situation de faire face à bien des éventualités, de résister à de grandes attaques comme de se lancer dans de vastes opérations de police. Elle est en possession de moyens qui lui permettent de se tirer d'affaire, d'éviter d'être taillée en pièces. La colonne est légère, maniable, faite d'un alliage de troupes de ligne, propices aux actions de masse, à forte cohésion, aux chocs frontaux, aux coups de butoirs visant à user les forces adverses ou à y créer la rupture, et de troupes légères et spéciales, adaptées aux critères de la guerre d'Afrique, spécialement à la légèreté et à la mobilité de la guerre de montagne. La colonne emporte avec elle des obusiers de montagne que transportent des mulets, mieux appropriés aux chemins kabyles que les chevaux.

En somme, l'effectif déjà considérable de ses troupes permet à la colonne de réaliser des opérations importantes, en jouant sur sa force de concentration et de cohésion (môles de fixation...). La colonne Camou a un effectif égal ou supérieur à la population totale des Ouzellaguen, en comprenant parmi celle-ci les enfants, les femmes et les vieillards. En prenant le nombre total de fantassins, armés et non armés, des Ouzellaguen, le rapport est de 8 à 10 pour un, en faveur de la colonne.

L'effectif de la colonne Camou atteint son effectif maximal à l'approche du territoire des At Immel et des Ouzellaguen, venant de recevoir en renfort deux bataillons, le 16 mai, à Bougie, l'un du 8e de ligne et l'autre du 22e léger. C'est désormais l'effectif dégagé par expérience, à cette époque, dans la guerre d'Afrique, surtout dans la ligne des instructions données par Bugeaud, sachant que cette colonne archétypale ou classique devant faire à peu près 6000 hommes. La colonne Camou convient parfaitement au type d'expédition punitive qu'on lui demande, dans des zones montagneuses à forte densité de population, face à des contingents éventuellement supérieurs en nombre, même si elle a été levée précipitamment, dans des circonstances particulières, avec des troupes prises dans les divers centres de commandement, Alger, Aumale, Constantine, Sétif, Bougie.

En effet, l'insurrection provoquée par Bou Baghla oblige le gouvernement général à monter une colonne avec les troupes de réserve, aussi rapidement que possible. Bosquet qui s'était porté aux Bibans avec les troupes de Sétif, puis celles qu'il recevait d' Aumale, pour attaquer Bou Baghla, se vit contraint de s'arrêter net conformément aux instructions du ministère transmises par le gouvernement général. Il lui était enjoint de laisser le commandement de ces troupes au général Camou, chargé de le remplacer pour opérer dans l'Oued Sahel. Il était profondément en colère, non pas contre Camou, mais parce qu'on lui refusait d'opérer sur le territoire qui est du ressort de son autorité militaire. Il devait rejoindre Saint-Arnaud en Petite Kabylie,

 

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dans une campagne qui restait pour lui, avant de s'y rendre, une erreur fondamentale, le véritable danger était chez les Zouaoua. Mais peu après, le 26 mai, il quittait Saint-Arnaud avec environ 2000 hommes et revenait auprès de Camou. La jonction des deux colonnes se fit le 30 mai, aussitôt les combats de Elma bou Aklan.

 

 

© Abdel-Aziz Sadki

 

mis en ligne le 3 février 2013

 



[1] Julien-Vincent Joseph Le Rouxeau de Rosencourt, né le 23 mars 1806 à Quimper, entre à l'école de Saint-Cyr en 1825. Il passe au service des bureaux arabes en juin 1854, devient colonel commandant la subdivision de Sidi-Bel-Abbès, puis général commandant la subdivision d'Aumale. Il cesse de s'occuper des affaires arabes en 1865.

[2]2 H 8 : 26 juin 1851, dépêche télégraphique, le Commandant supérieur de la subdivision d'Aumale, le colonel d'Aurelle de Paladines, au Général Commandant la Division d'Alger, Blangini.

[3]Au 4 mai 1851, De Wengi, commandant supérieur du cercle de Bougie, pouvait aligner, pour la cavalerie, 30 sabres, des cavaliers des Mezzaïa et les khiélas des Djebabra (Ou Rabah ben Cheïkh Saâd). En tout 85 à 90 chevaux.

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