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HISTOIRE DE L'ALGERIE

HISTOIRE DE L'ALGERIE

Sont présentées ici des recherches historiques sur l'Algérie du XIXème siècle et de manière générale sur le Maghreb et la France. Aux recherches s'ajoutent des points de vue, des notes de lecture et des instruments de travail.


Ouzellaguen 25-28 juin 1851 - Autopsie d'un grand combat - Guerre totale, guerre cruelle - Un combat absolu et irrévocable

Publié par Abdel-Aziz Sadki sur 19 Février 2013, 19:24pm

Catégories : #Histoire des Ouzellaguen

 

6) Le combat absolu et irrévocable

 

Par leur intransigeance dans la guerre, marquée par des actions sans relâche depuis de nombreuses années, par leur participation clé à la grande insurrection de Bou Baghla, à son véritable foyer,

 

p 135

 

les Ouzellaguen peuvent croire que la répression sera dirigée aussi spécialement contre eux et que, sanglante, elle le sera quoiqu'il advienne, notamment pour les dommages faits contre Ben Ali Chérif, et par l'intermédiaire de ce dernier qui les mentionne ainsi fréquemment dans ses lettres, contre l'autorité française. Ils savent que la colonne ne fait pas de quartier. Même lorsqu'elle ne rencontre pas d'opposition directe, ils savent qu'elle réduit les villages en cendres, dévaste les champs et les jardins, abat les arbres fruitiers, lève de lourdes contributions de guerre, prend des otages et impose ses hommes dans la direction des villages. Elle frappe aveuglément, comme le cyclope à l'œil crevé, ne sachant où donner en priorité, où anéantir le foyer vrai de la révolte. En remontant la rive gauche de l'Oued Sahel, le choc s'annonce inévitable avec les Ouzellaguen, une des deux têtes-de-pont de la résistance kabyle dans cette vallée de l'Oued Sahel, avec les At Mellikeuch.

Les Ouzellaguen jusqu'au milieu de l'année 1851 se sont préservés des agressions extérieures. Ils se comportent comme s’ils étaient du Djurdjura intérieur, naturellement protégés. D'ailleurs, un moment donné, au début de l'insurrection, surpris d'entendre parler des Mezeldja, qu'il connaissait sous un autre nom, Beauprête ne savait pas les placer sinon sur le versant nord du Djurdjura ! Se préserver ainsi fut possible car ils possèdent une rigoureuse et remarquable cohésion interne, une ligne de résistance depuis toujours très claire, à l'exception du seul moment de soumission à la colonne Bugeaud. Ils ne reculent devant rien et font tout pour se mettre dos au mur. Cette cohésion n'existe pas à ce point chez les autres populations où les choses sont plus partagées, et même chez les At Mellikeuch, le parti de la soumission s'il baisse la tête n'en existe pas moins.

Les Ouzellaguen n'ont pas de parti profrançais et il n'existe parmi eux que quelques individualités isolées favorables à la soumission et pour partie alliées à Ben Ali Chérif. Camou le reconnaît lui-même, la valeur de son témoignage est grande puisqu’ordinairement les militaires français, pour des raisons politiques et tactiques bien compréhensibles, sous-estiment l'importance des résistants et gonflent le nombre des partisans de la soumission.

"Le cherif qui ne se retire que pied à pied ayant su que les Mcisna, Mellaha, les gens de l'Arach, les Beni Aïdel eux mêmes étaient en pourparlers de soumission a été obligé de se réfugier sur la rive gauche et d'y rester. Il s'est arrêté chez les Ouzellaguen bien que cette tribu soit encadrée entre les Beni Oughlis qui ont fait soumission et les Illoula qui tous les jours entourent si ben aly chérif le suppliant de rentrer en se battant d'ailleurs contre les partisans de Bou Baghla.

Il ne fallait pas laisser même ce refuge au cherif quoiqu'il eût de 1. [sic] retraite chez les Beni Hidger (Zouaouas). Ces Ouzellaguen

 

p 136

 

qu'une colonne française n'avait jamais visités comptaient quelques partisans de notre autorité. Mais la plus grande masse, induite par les brillants mensonges et l'audace du cherif, l'avaient reçu, avaient accepté la protection et juré de se défendre avec lui : pour preuve de leurs résolutions, ils avaient gardé dans leurs villages leurs femmes, leurs enfans et leur mobilier. Le Chérif qui, depuis le 1' juin, n'avait pu obtenir contre nous, de résistance armée de q.q. valeur, attendait beaucoup de la présence des familles pour exciter les hommes à bien faire."[1]

Les Ouzellaguen ne veulent pas d'un simple combat qui serait une péripétie dans une lutte plus vaste, dans lequel ils seraient en vérité les seuls à faire les frais. Ils veulent un combat ultime : défendre l'intégrité de leur territoire et de leurs biens, interdire l'accès à leurs villages et à leurs champs, exiger l'application totale des serments passés. Les Ouzellaguen combattent pied à pied, chaque pouce de terrain connaît sa dépense acharnée, chaque ruelle, sentier, chemin, village, adrum, maison, ravin, bois, maquis, rocher, crête, disant assez l'ampleur de leur détermination.

 

 

 

© Abdel-Aziz Sadki

mis en ligne le 19 février 2013

 


[1] 2 H 8, rapport sur la situation du pays, le 26 juin, Camou au gouverneur général.

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