La petite notice biographique qui suit, datée de 1865, à un moment où on ne parle plus de lui, est très défavorable à Bû Ma’za. S’y perpétuent l’idée d’artisan de la superstition, les traits d’un aventurier et le caractère de cruauté. Il ne peut souffrir la comparaison avec ‘Abd al-Qâdir. L’auteur n’a pas pour lui que mépris et l’affuble d’une insigne médiocrité. L’homme n’aurait rien compris à la civilisation, alors perçue comme exclusivement européenne et serait au contraire l’expression de la sauvagerie et de la barbarie.
Par contre, l’audace et l’activité dans la lutte deux années durant à partir du Dahra contre les Français ne se démentent pas et sont également rappelées.
Bû Ma’za se constitue prisonnier, non pas le 12 avril 1847, mais le lendemain.
Un élément nouveau apparaît timidement : le fondement mystique de la personnalité de Bû Ma’za, tiré de son appartenance au milieu des confréries, que l’on retrouvera un siècle plus tard chez Roger Germain et Charles-André Julien.
« BOU-MAZA (père de la chèvre). Aventurier arabe, ainsi surnommé parce qu’il se faisait accompagner d’une chèvre, aliment de la superstition populaire. Personnage guerrier et mystique, qui souleva contre la France les tribus des montagnes du Dahra, sur la limite des provinces d’Alger et d’Oran, de 1845 à 1847, aspirant à supplanter Abd-el-Kader, dont le prestige déclinait. Après deux ans de luttes, où il se signala par son audace, son activité et sa cruauté, il se constitua volontairement prisonnier le 12 avril 1847. Interné en France, il avait passé près de cinq ans dans le fort de Ham, lorsqu’un décret l’a rendu à une liberté restreinte par la surveillance de la police. Caractère et esprit médiocres, facilement entamé dès les premiers jours par les côtés les moins estimables de la civilisation, Bou-Maza est resté, malgré une certaine notoriété acquise à son nom, infiniment au-dessous d’Abd-el-Kader auquel il avait prétendu succéder. »
Maurice La Châtre (1814-1900), Nouveau dictionnaire universel, t. I, Paris, Docks de la Librairie, 1865, p. 632-633.